Les quatre saisons de la vie avec Dieu

Les quatre saisons de la vie avec Dieu

Esaïe 55

Première saison : La rencontre avec le Dieu qui étanche ma soif

C’est une « bonne nouvelle » qui inaugure notre première saison avec Dieu : « Vous qui avez soif, venez ! » A tous les assoiffés du monde, assoiffés de justice, d’amour, de paix, de miséricorde, d’harmonie, de consolation… à tous les assoiffés que nous sommes, Dieu dit : « Venez ! » [« Bonne Nouvelle » est le synonyme du mot Évangile]. Il y a au fond de l’homme un vide qui a la forme de Dieu, observe Blaise Pascal.

Comme une biche qui soupire sur le lit du torrent, ainsi je soupire après toi, ô Dieu ! Ps 42.1

L’homme cherche inlassablement à combler ce vide avec ce qu’il a sous la main : les distractions – le travail – ses activités quotidiennes – ses loisirs – ses biens matériels – etc… Or ces réponses ne sont que des mirages qui ne peuvent pas combler la profondeur infinie de notre vide. Seul quelqu’un d’infini peut le combler.

Pourquoi pesez-vous de l’argent pour ce qui ne nourrit pas ? Es 55.2

Des siècles plus tard, Jésus reprendra pour lui la même invitation.

Le dernier jour, le grand jour de la fête, Jésus, se tenant debout, s’écria : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il boive Jn 7.37 (voir aussi Ap 21.6)

Tendez l’oreille… venez à moi ; écoutez, et vous vivrezEs 55.3

Tout commence par une parole qui touche nos oreilles et notre cœur. Tendez l’oreille ! Dans le brouhaha des discours prononcés dans la société, il y en a un, un seul qui vient de Dieu, tendez l’oreille pour le capter ! Mais il ne suffit pas d’entendre, il faut encore répondre à l’invitation de Dieu qui nous appelle à venir à lui. Toutes les autres représentations de Dieu dans notre monde présentent un dieu qui édicte des règles morales ou exige des rites pour lui plaire (Animisme, Islam, Judaïsme, Hindouisme, …). Seul le Dieu de la Bible nous dit « Venez à moi », pour construire avec lui une relation personnelle.

Venez à moi, car je veux conclure pour vous une alliance perpétuelleEs 55.3

Nous découvrons par cette invitation que nous sommes aimés par Dieu, invités à vivre un compagnonnage avec lui. L’alliance est un contrat de solidarité que Dieu conclut avec nous… plus solide que toutes les assurances que la société nous offre. Dieu n’est pas le spectateur de la vie des hommes sur la terre. Il s’y implique. Il s’engage à nos côtés. Il a choisi l’homme comme son partenaire pour conclure avec lui une alliance, un pacte. Une alliance d’amour, de liberté mais aussi une alliance d’engagement réciproque.

La première saison est l’émerveillement d’une rencontre qui étanche notre soif.

Deuxième saison : Visiter nos zones d’ombre

Le Dieu qui étanche ma soif me permet de renoncer au mal et me promet son pardon.

Que le méchant abandonne sa voie, et l’homme malfaisant ses pensées ; qu’il revienne au SEIGNEUR, qui aura compassion de lui, — à notre Dieu, qui pardonne abondamment.Esaïe 55.7

Après la première saison de la rencontre avec Dieu qui étanche notre soif, il nous arrive de découvrir qu’il y a des zones d’ombre en nous. Tout n’est pas aussi lumineux, parfait et harmonieux que nous le désirons. Nous avons hérité d’histoires de familles pas toujours gaies. Nous avons vécu des épisodes douloureux. Nous découvrons en nous des passions, des traits de caractère pas toujours agréables. Nous découvrons nos faiblesses, nos peurs, nos jalousies, des injonctions familiales dépréciatives (« tu n’es bon à rien »), des rejets douloureux, des déceptions, des trahisons… et j’en passe. Nous découvrons que notre vie avec Dieu est contaminée par ces ombres… Et cela nous désole, cela nous décourage, car nous rêvons d’être de bons chrétiens, parfaits, à l’image de Jésus…

Il y a du découragement lorsqu’on oublie la seconde partie du verset (… que le méchant revienne au SEIGNEUR, qui aura compassion de lui, — qu’il revienne à notre Dieu, qui pardonne abondamment.)

Le pardon est auprès de Dieu. Un pardon abondant qui nous permet d’apprivoiser nos ombres. Il est vain de s’imposer d’être vertueux, car le naturel revient au galop. Par contre, nous pouvons apprivoiser nos ombres pour leur ôter leur aspect destructeur… (cf. Jean Monbourquette, Apprivoiser son ombre, éd. Bayard).

Si nous confessons nos péchés, il est fidèle et juste pour nous les pardonner, et pour nous purifier de toute iniquité. 1Jn 1.9

Apprivoiser nos ombres nous permet de les laisser aller parce que ces ombres sont liées à notre ego. Or nous pouvons laisser aller notre ego, ce que nous avons cru nécessaire pour nous construire. Cet ego a certes été parfois utile dans les situations difficiles des conflits de l’existence (par exemple face à des personnes au caractère d’abuseurs qui menacent notre existence). Mais devant Dieu nous pouvons renoncer à nos ombres et au bénéfice qu’elles semblent nous donner. C’est ce que la Bible appelle : accepter de perdre sa vie.

En vérité, en vérité, je vous le dis, si le grain de blé qui est tombé en terre ne meurt, il reste seul ; mais, s’il meurt, il porte beaucoup de fruit.Jn 12.24

Nous pouvons permettre à l’ego de lâcher prise pour nous mettre sous l’autorité de Dieu. La mort de l’ego donne une nouvelle vision du monde, celle de l’amour divin qui ressuscite ce qui était perdu. La deuxième saison est certes douloureuse, mais elle est une prise de conscience nécessaire, nul n’y échappe. Une prise de conscience qui nous conduit à être vrais face à Dieu, face aux autres et à nous-mêmes. Une prise de conscience salutaire car elle est enveloppée dans la bienveillance divine.

Troisième saison : Mes pensées ne sont pas vos pensées – Le Dieu qui nous aime et étanche notre soif est toujours plus grand…

Car mes pensées ne sont pas vos pensées, et vos voies ne sont pas mes voies, dit le Seigneur. Autant les cieux sont élevés au-dessus de la terre, autant mes voies sont élevées au-dessus de vos voies, et mes pensées au-dessus de vos pensées.Es 55.8-9

Passages parallèles :

Ne te presse pas d’ouvrir la bouche, et que ton cœur ne se hâte pas d’exprimer une parole devant Dieu ; car Dieu est au ciel, et toi sur la terre : que tes paroles soient donc peu nombreuses.Ec 5.2
L’Eternel, ton Dieu, est au milieu de toi, comme un héros qui sauve ; Il fera de toi sa plus grande joie ; Il gardera le silence dans son amour ; Il aura pour toi des transports d’allégresse.So 3.17

Ces versets sont curieux… ils paraissent décalés. La première saison est la découverte du salut, de la bonté de Dieu. Elle est l’invitation à faire alliance avec lui pour devenir son disciple. Une saison lumineuse, magnifique. La deuxième nous invite à reconnaître lucidement nos ombres, les confesser et les apprivoiser en vivant de la miséricorde et du pardon de Dieu. Ces deux premières saisons devraient logiquement nous conduire directement au ciel ! Que viennent faire ces versets 8 et 9 ?

Ils nous apprennent une vérité fondamentale. Dieu est Dieu… Or nous, nous sommes toujours tentés de mal le comprendre, de projeter sur lui nos désirs de toute puissance, de le manipuler, de nous en faire de fausses représentations. Dieu est toujours plus grand que tout ce que nous pouvons dire et penser de lui. Nous ne connaissons qu’en partie, d’une façon limitée (1Co 13.9).

Dieu est toujours plus grand que tout ce que j’ai compris de lui. Tout ce que nous affirmons au sujet de Dieu, aussi exact que cela puisse être, est encore bien loin de la réalité de sa personne…. Nos mots ne peuvent dire, ni contenir la plénitude de ce Dieu de totale transcendance.

Pourtant il nous faut parler. C’est le paradoxe de la foi chrétienne. C’est par notre bouche que nous célébrons Dieu. La foi chrétienne est enseignée au catéchisme, dans les ateliers bibliques, par les prédications. C’est utile et nécessaire. Pourtant tout ce bagage intellectuel, toute cette somme de connaissance ne permettra jamais de posséder Dieu, de dire la réalité ultime de Dieu.

Prêcher est difficile (« une détresse », dit Karl Barth). A l’école on enseigne une matière, à l’Église, dans nos paroles, nos prédications, nous parlons d’une personne… La prédication ne peut que suggérer Dieu, elle est un poteau indicateur qui montre le chemin pour aller vers lui.

Dieu n’est pas tant l’objet de notre connaissance que la cause de notre étonnement, de notre admiration, notre louange, et notre confiance.

Trois conséquences pratiques

  1. Dans les épreuves, ne pas attribuer à Dieu nos désirs ni projeter sur lui nos rêves de toute puissance et nos attentes narcissiques.Il est dur de vivre des épreuves, la maladie, un divorce, un veuvage, des prières non exaucées, etc. Spontanément nous avons la tendance d’en rendre Dieu responsable.

    Seigneur, si tu avais été ici, mon frère ne serait pas mort !Jn 11.21, 32

    Dans les épreuves nous sommes déçus, nous reportons alors sur Dieu notre déception et nous nous éloignons de Lui. Pourquoi Dieu n’est-il pas intervenu ? Pourquoi a-t-il permis tel ou tel événement ? Nous reportons sur Dieu nos déceptions en le rendant responsable de l’événement qui nous a blessés. Or, agir ainsi c’est faire preuve de myopie. C’est d’abord nous prévaloir d’un statut qui n’est pas le nôtre. Nous ne sommes pas Dieu. C’est ensuite lui prêter des attributs qu’il n’a pas. En agissant ainsi nous faussons notre relation avec lui et nous nous privons de son secours.

    Le récit de la tempête vécue par l’apôtre Paul en Méditerranée est riche d’enseignements à ce sujet Ac 27. Paul avait eu la bonne intuition. Pourquoi est-ce que Dieu n’a pas fait comprendre cette intuition au commandant du navire ? Lorsque la tempête a éclaté, Dieu aurait pu l’arrêter en un instant ! Pourquoi les passagers ont-ils dû la subir pendant 14 longues journées ? Pourquoi ce long et pesant silence de Dieu ?

  2. Face à la diversité. Nous ne sommes pas seuls à parler de Dieu. Nous ne sommes pas seuls à chercher Dieu. Nous ne sommes pas seuls à témoigner du Christ… Or ces témoignages sont d’une grande diversité : Catholiques – Protestants – Orthodoxes – Adventistes – Baptistes – Pentecôtistes – etc… De mon berceau évangélique qui m’a vu naître à la foi, je ne comprenais pas la pertinence des autres formes d’expression de la foi. Or j’ai dû apprendre à accueillir cette diversité… un accueil à vivre avec discernement… J’ai appris que Dieu est plus grand que ma manière de le comprendre et ma manière d’en témoigner. Les autres expressions de la foi ont autant de valeur que la mienne.
  3. Face aux paroles prononcées autoritairement au nom de Dieu. Il est bon de recevoir, de vivre et d’exprimer, sous forme de charisme, les paroles et les signes que Dieu donne à son Église. Cependant il est nécessaire de toujours garder à leur égard une distance critique. Dieu est plus grand que tout ce qui est dit en son nom. Les Écritures donnent de nombreux exemples à ce propos.

Cette troisième saison est celle qu’Elie a découverte sur la montagne du Sinaï. Au Sinaï, Elie a appris que Dieu n’était ni dans la tempête, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu… mais dans le bruissement silencieux d’un murmure doux et léger… Cette saison enracine notre foi dans la profondeur d’une communion intime avec Dieu où Dieu n’est plus servi, aimé et adoré pour ce qu’il nous donne, mais il est servi, aimé et adoré pour ce qu’il est. Alors nous pouvons passer à la quatrième saison : versets 10 à 13.

Quatrième saison : Vivre la fécondité de Dieu

La prise de conscience de la vraie nature de Dieu nous permet d’être davantage conscients de notre fragilité. Libérés de nos illusions de perfection nous vivons le pardon que Dieu nous accorde dans sa miséricorde, sans être écrasés par notre pauvreté spirituelle ni crispés sur nos fautes.

Dieu travaille dans et au travers de nos faiblesses. Nous lui faisons confiance. Il conduira toutes choses à bonne fin. Il mettra en œuvre les changements nécessaires en nous… Nous découvrons que la personne que Dieu aime avec la tendresse d’un Père, qu’il veut rejoindre et transformer par son amour, ce n’est pas la personne que j’aurais aimé être, c’est celle que je suis. Aussi nous n’avons plus besoin de prouver quoi que ce soit à nous-mêmes et aux autres. Il y a des combats qui deviennent inutiles… sans pour autant devenir des lâches. Nous pouvons développer une immense confiance en Dieu… confiance qui n’est ni résignation, ni fatalisme… une confiance dynamique et active dans sa souveraineté absolue. Nous ne sommes plus le produit de nos réussites ou de nos échecs… Nous devenons moins sensibles aux pressions, aux attentes de soi et des autres. Nous pouvons être heureux lorsque nous vivons de belles expériences et paisibles dans les échecs. Cette saison est marquée par la paix de Dieu.

Oui, vous sortirez avec joie, et vous serez conduits en paix Es 55.12

La paix est l’aspiration ultime qui est au fond du cœur de l’homme… Le paradoxe veut que toutes nos guerres sont entreprises au nom de la paix… que nous voulons imposer selon notre compréhension des choses. Alors que la vraie paix c’est celle que Dieu donne.

Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix. Je ne vous donne pas comme le monde donne. Que votre cœur ne se trouble point, et ne s’alarme point.Jn 14.27

Une paix non pas liée aux circonstances favorables. Non pas la paix du riche qui a accumulé des trésors, mais la paix d’une confiance inébranlable en Dieu. Car nous réalisons que notre identité, notre source, nos racines sont en Dieu.

Dieu se plait à demeurer en nous par le Saint-Esprit, que Jésus appelle le Paraclet, littéralement « celui qui est appelé à côté [de nous] », le pédagogue, l’infirmier, l’avocat, le parent aimant… Une présence du Saint-Esprit vécue tout simplement, sans nécessairement vivre des manifestations ostentatoires car désormais nous savons que tout va passer, la connaissance, les miracles, tout passera… seules demeurent la foi, l’espérance et l’amour, et la plus grande des trois est l’amour. La seule chose qui demeure est d’être recueillis en Dieu. Cette quatrième saison est celle de la fécondité, de la sérénité. Elle durera éternellement.

Notons que ces saisons ne sont pas nécessairement chronologiques. Nous pouvons nous trouver simultanément dans l’une et l’autre. Elles sont les multiples faces de notre communion avec Dieu.

Questions

 Quelle saison est-ce que je vis actuellement ? Que m’apporte-t-elle ?

  • Quelle est ma compréhension de ces quatre saisons ?
  • Laquelle de ces saisons m’a-t-elle le plus marqué et pourquoi ?
  • En quoi la paix que Dieu donne est-elle si importante ?

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